Neo Soul: Pépite de l’underground tricolore en plein revival
Une (trop) brève histoire de la Neo Soul française. Épisode 3.
Certains artistes représentent le mouvement ici, en France depuis 1995. Nous l’avons vu, Les Nubians en sont les pionnières. Mais on pense également à Native, K-Reen, China Moses, Sandy Cossett ou encore Teri Moïse. L’émergence et la propagation du mouvement a été plus effective dans l’underground, alors que l’industrie de la musique favorisait dès 1999, le R&B et le rap français. Avec un revival constaté depuis quelques années, la neo soul, loin d’être enterrée, s’organise et la nouvelle scène est brillante. Tu as raté les deux premiers épisodes? Ce serait dommage de n’avoir qu’un bout de l’histoire…
Au sommaire de ce 3ème épisode:
⏯︎ Neo Soul : Pépite de l’underground tricolore
- Les soirées et collectifs d’artistes
- Les passeurs de savoirs et les médias
⏯︎ Nouvelle scène neo soul : les rèfs incontournables à suivre!
Neo Soul 0-1 R&B : La prédominance du R&B
2001. En France, la neo soul souffre de l’assimilation aux R&B. Il est vrai que la frontière est parfois mince. Mais l’industrie française a choisi de favoriser le second, et de le « marketer » via des dynamiques de quartiers populaires, et de chanteurs.ses à voix (ou non), tel que Wallen, Assia, Leslie, Kayna Samet, LÄAM, Matt Houston ou Ophélie Winter. Finalement, les sonorités flirtent davantage avec la pop qu’avec le R&B dans son essence. Il y a bien eu les dignes représentants K-Reen (1998), Hasheem, Afrodiziac (Ad Vitam Eternam, Sony Music, 2001), ou Vibe (Confession, Capitol Music, 2001), pour ne citer qu’eux.
Constat : les musiciens afro descendants ne sont pas représentés dans la sphère mainstream. Et l’investissement des uns n’était pas suffisant pour se distinguer parmi une industrie boostée aux boys band et un rap tricolore en pleine effervescence. Les directions artistiques de l’époque sont représentatives des différentes origines ethniques qui composent la France, pourtant. On pense à Bisso Na Bisso (1999), Raï N B (2004), Kimberlite zouk (2004). Toujours rien côté neo soul.
Neo Soul : Pépite de l’underground tricolore
En termes de neo soul, on l’a dit, nous avons nos prémices et nos fondations en France : Native (1993-1997), Les Nubians évidemment (1995), Teri Moïse (1996), China Moses (1999-2006), Sandy Cossett (Au Bonheur, 2002). On pense aussi à Badié, qui proposait la même année son album fusion Élément Terre (Warner France, 2002).
Certains artistes avaient aussi les épaules pour légitimer la neo soul à un plus haut niveau : Sly Johnson, Sinclair, Tété ou Ben L’oncle Soul par exemple. Quant à nos Princesses Nubiennes, 2003 sonne leur grand départ vers les États-Unis, où le mouvement prend d’assaut les scènes underground et vit par lui-même.
On est parties parce qu’il ne se passait rien en France, en fait.
Les Nubians, A Real Conversation w/ Les Nubians
Il faut bien admettre que problème de définition du genre musical, associé à la frilosité des labels et au refus de certains artistes de rentrer dans des cases, cela ne laissait que peu de chance au mouvement de s’émanciper pour prendre sa place sur le marché. Ajoutons à cela, l’avènement du numérique et du téléchargement, qui a radicalement transformé le paysage musical et les habitudes de consommation.
Au stade embryonnaire, la neo soul bleu blanc rouge, portée par des connaisseurs qui poursuivent leurs explorations via le « world wide web”, et les plateformes comme Myspace ou Skyrock, continue de se propager à une petite échelle, dans les capitales françaises et les scènes underground.
Les soirées et collectifs d’artistes
Le mouvement neo soul fait son chemin en France par le biais de collectifs d’artistes et de soirées parisiennes emblématiques. Parmi elles, l’on retient : les Big Bang Gang de la Belleviloise, autant que les afterwork Groovedeluxe à la Favela Chic ou les mythiques Hip Hop Loves Soul.
Au même titres que les autres capitales musicales comme New York, Philadelphie ou Londres, Paris a, elle aussi, eu l’honneur d’accueillir une « Black Lily » (2003). Pour l’anecdote, les Black Lily de Philadelphie ont été impulsées par Jazzyfatnastees, à l’époque très investi dans le collectif d’artistes de The Roots. Les évènements Black Lily ont par exemple contribué à lancer les carrières de Jill Scott et Erykah Badu. Le principe? Chanteurs, rappeurs et poètes sont invités à se produire sur scène, accompagnés par le groupe résident. C’est le moment de partager avec le public l’étendu de sa créativité et de partager son art, de façon improvisée.
Dans le même esprit, les célèbres Rimshot Party de Rimshot crew : une sorte de « Soulquarians à la française », à la fois backing band, organisateurs de soirées et de concerts, ont définitivement marqué les esprits. On cite également les lives emblématiques du Bizz’Art, établissement qui accueille encore aujourd’hui, les plus grandes signatures neo(soul).
Les Passeurs de savoir & les Médias
Tous ces acteurs, à la fois militants et ambassadeurs, pouvaient compter sur certaines figures emblématiques pour diffuser les valeurs de la neo soul. JP Mano, par exemple, a contribué à porter les connaissances, les valeurs et les richesses de la neo soul que ce soit d’un point de vue académique (conférences, conversations) ou de l’ordre de l’entertainment.
Comment parler de la circulation de la neo soul en France, sans parler des médias ? Ils jouent un rôle crucial dans la diffusion de cette scène. On peut/pouvais compter sur Soul Bag, Soul Kitchen, Sounds So Beautiful ; sans oublier les classiques américains distribué en France à l’époque en version papier tels que VIBE ou The Source. Les webradios, au même titre que les plateformes de téléchargement (Limewire, Soulseek) ont eux aussi, assuré la propagation de nouveaux talents neo soul. La génération d’« artistes internet » s’en souvient encore, certains ayant explosé par ce biais.
Alors quoi conclure de tout ça ? La neo soul rencontre bel et bien son public en France. Et ce marché, qualifié « de niche » est porté par une communauté d’artistes, de mélomanes et de militants qui ont assuré sa transmission et son évolution en France.
Nouvelle scène neo soul : les rèfs incontournables à suivre!
28 ans après son apparition. La neo soul atteste d’un regain de passion auprès de nos artistes français ces cinq dernières années. Nos artistes bénéficient, pour leur visibilité, des avantages du web social et de la force de leurs communautés.
Aussi et surtout, la nouvelle génération neo soul française se structure : les artistes travaillent main dans la main et montent leurs labels indés, souvent crées pour assurer leur survie et leur liberté créative : Nubiatik, Roche Musique, Palais Mental. Ils prennent les risques que les maisons de disques refusent de prendre depuis 1995. Nos artistes neo soul sont soutenus par les plateformes de streaming et leur radar (Colors, Spotify Radar, Deezer Session), mais aussi WeeKult. et les autres médias indépendants.
Pourquoi avoir intitulé ce décryptage en 3 parties : Une (trop) brève histoire de la neo soul 🇫🇷? Parce que son écriture son poursuit pour s’inscrire dans la durée, parce que tant que les artistes auront de belles propositions à nous offrir, l’histoire sera toujours trop courte ! Trêve de bavardages (somme toute, très intéressants), place à la liste non exhaustive des artistes neo soul français à suivre impérativement :
Les Nubians (dispo sur weekult.com) ● Adi Oasis (dispo sur weekult.com) ● Sly Johnson (dispo sur weekult.com) ● Monsieur Nov ● Hasheem ● Anaiis ● Enchantée Julia ● Bonnie Banane ● Crystal Murray ● LYNN ● Kiara Jones ● Oscar Emch (dispo sur weekult.com) ● Anna Kova ● Lykuin ● Meemee Nelzy ● Maleïka ● Aworii (dispo sur weekult.com) ● Osmojam ● Nelly Stan ● Elijah Rose ● Jazmyn ● Quinze ● Stefan Filey ● Duñe & Crayon ● J-Silk ● Kissamilé ● Doris ● Laetitia Dana ● Kyma ● Lina Stalyte ● Leonie ● Freddysphere etc.
That’s a wrap! Ce décryptage en 3 parties intitulé Une (trop) brève histoire de Neo Soul française touche à sa fin. Tu as kiffé cette rétrospective? Notre objectif est d’en produire davantage : For The Culture! Tu peux soutenir le travail des bénévoles du média indépendant WeeKult. en contribuant financièrement à son expansion.